tryna act nice girl your cover's blown. (eliot)

~ Just let me know I'll be at the door, hoping you'll come around. Just let me know I'll be on the floor, maybe we'll work it out. w/ @eliot drysdale

Il lui arrivait – sur des bases plutôt régulières – de s’écouter parler. Et plus le temps passait, plus elle se trouvait bonne dans ce qu’elle faisait. Elle s’achèterait volontiers un appartement si elle n’était pas contrainte en grande partie par les difficultés de financement auxquelles elle risquait de se confronter si elle essayait d’acheter un appartement comme celui-ci. Elle avait disposé les papiers bien à plat sur la table de designer qui meublait la pièce, un stylo posé bien parallèlement à la feuille. Elle pianotait tranquillement sur son téléphone en attendant que les clients viennent régler la vente et lui permettent d’obtenir le précieux versement qui allait lui permettre de régler le panier d’achats qu’elle était en train de se constituer. Victoria pourrait tout à fait vivre dans ce genre d’appartement. D’ailleurs, elle avait passé la bonne partie des visites avec les clients à émettre des avis très personnels sur les biens qu’elle présentait. Un investissement total dans son travail en somme. En entendant les pas revenir vers elle, elle rangea son téléphone et accueillit les clients avec son sourire le plus professionnel. Le crissement du stylo sur le papier évoquait pour elle le bruit d’un bain qui coule et le goût d’un vin blanc français sur ses lèvres, duo idéal pour fêter une vente rondement menée. En attendant, elle sortit une bouteille de champagne et trois coupes de son cabas en toile. L’achat arrosé et les traditionnelles félicitations, vous allez être très heureux ici, c’est parfait pour fonder une famille, déclamées sur le seuil de la porte, elle passa par la cuisine laver les verres et les essuya dans un bout de tissu qui trainait sur le dos d’une chaise – un foulard de la propriétaire ? Dans le doute, elle posa déplia le tissu pour qu’il sèche. Les lumières éteintes et la porte fermée derrière elle, elle pouvait aller s’adonner à son rituel de relaxation qu’elle méditait depuis une bonne heure. Dans le hall de l’imposant immeuble, elle marqua un temps d’arrêt et lâcha un merde venant du fond du cœur en se rendant compte qu’elle se baladait avec sa bouteille de champagne entamée à la main. Elle marqua un temps d’arrêt pour poser son sac sur un petit meuble où trônait une plante – soutenant intérieurement une nouvelle fois la thèse que les gens avaient vraiment de l’argent à redonner pour payer un concierge à arroser les plantes. Elle fouilla dans son sac à la recherche du bouchon ou en tout cas d’une manière de faire tenir la bouteille sans qu’elle se renverse. Parce qu’elle apprécierait autant finir une bouteille passée en comptabilité plutôt que d’en ouvrir une à la maison. Son entreprise fut compromise quand elle entendit le ding de l’ascenseur. Elle se retourna prestement pour adresser un « Bonjour » poli. Elle allait retourner à ses occupations mais la vague impression d’apercevoir une chevelure blonde lui fit reporter son attention sur la personne qui traversait le hall dans sa direction. « Tiens, tiens. » Le visage de la brune s’éclaira d’un sourire amusé. Est-ce qu’elle avait remarqué en enquêtant sur le voisinage qu’une boîte aux lettres portait fièrement le nom de Drysdale ? L’information n’avait pas manqué de lui rester en tête. Même si franchement les probabilités de le croiser … C’était la cinquième fois qu’elle mettait les pieds dans l’immeuble pour voir cet appartement et elle ne l’avait pas croisé alors bon. Délaissant sa bouteille et son sac, elle croisa les bras, mimant une réflexion intense. « Tu sais, ça tombe bien que tu sois là. J’ai repensé à ta demande la dernière fois, et il se trouve que je viens juste de vendre un appartement ici. Quelles sont les chances… Dommage que tu sois passé à côté de l’occasion. Mais en fait, tu habites déjà ici ? » Elle tendit le bras pour rattraper son sac. « Heureusement que tu n’es pas mon seul client, je l’ai vendu mais je me demande toujours pourquoi tu avais tellement besoin de trouver un appartement, le quartier est charmant. » Elle ne dirait pas que sa recherche pour Eliot était une perte totale de temps. Jamais Victoria n’aurait considéré un garçon comme Eliot comme une perte de temps, en temps normal.

Eliot dérogeait facilement à la règle du patron bourreau de travail et s'octroyait suffisamment de jours de congés pour qu'on le croit salarié à mi-temps ; pourtant quand il décidait de mettre la main à la pâte, on trouvait difficilement plus impliqué que lui. Le contact avec la clientèle n'y était pas pour rien puisqu'en tant que bon vivant, Eliot existait littéralement pour toute interaction sociale digne d'intérêt qu'on lui mettait sous le nez. Pourtant aujourd'hui, en cette bien terne journée de pluie, Eliot avait vite fait de s'ennuyer et enchaîner les cappuccinos n'arrangeait rien au poids de sa solitude. Adossé sur une chaise qu'il balance d'avant en arrière pour se donner l'impression que le temps passe, le blond finit par jeter l'éponge et se lève d'un bon en se raclant la gorge. — Bon Hannah, je te... — Laisse terminer et fermer la boutique, oui, t'inquiètes. Le coupe une jolie blonde au visage poupin d'une vingtaine d'années qui n'est autre que son employée, sans même lever le regard de son magazine. Eliot étouffe un rire et feint un air gêné - et il l'est peut-être un peu, d'être si prévisible aux yeux d'une gamine qui fait aussi bien son travail que lui, si ce n'est mieux puisqu'elle ne passe pas son temps à reluquer les clientes, elle. — Merveilleux, je te revaudrai ça. Ni une ni deux, le voilà qui enfile sa veste et franchit la porte sous un "c'est ça" un brin dédaigneux d'Hannah. Il trottine d'un bon pas jusqu'à sa voiture pour éviter la pluie et retrouve son charmant quartier de Chelsea alors qu'il n'est pas encore seize heures. Une journée au rythme léger qui lui a pourtant paru interminable et qu'il compte bien compenser par une soirée plus animée. Arrivé dans le hall, Eliot secoue sa veste et sa chevelure pour en faire tomber quelques gouttes de pluie et s'avance vers l'ascenseur avant qu'on ne l'interpelle à mi-chemin. — Victoria Grey. Il appuie sur chaque syllabe de son nom et prénom, un sourire félin s'emparant de ses lèvres. S'il s'est globalement habitué aux changements d'identités de ses connaissances d'Evermore - à vrai dire certaines lui semblent même plus réelles ici que dans leur ancien monde - il a cependant bien du mal à s'habituer à cette nouvelle Bianca. Fasciné par les changements opérés par une simple perte de mémoire, Eliot n'a eu de cesse de chercher la compagnie de cette Victoria, d'abord pour satisfaire son avide curiosité mais aussi et surtout pour se jouer d'elle comme elle pouvait se jouer de lui à Frostväll. Bianca était une femme de pouvoir, habituée à avoir l'avantage sur tout et tout le monde et Jack n'avait pas dérogé pas à la règle. Pourtant ici, et parce qu'elle ne se souvenait de rien et surtout pas de ses caprices d'une autre vie, Eliot avait décidé de changer la donne et d'inverser les rôles. Faire tourner Victoria en bourrique était rapidement devenu sa nouvelle lubie ; et il ne s'y prenait apparemment pas trop mal. — Quoi ? Ah non, j'habite chez ma soeur en fait. Le mensonge vient rapidement, suffisamment pour qu'il soit crédible et explique le probable "Drysdale" qu'elle a aperçu sur la boîte aux lettres. — Du coup je suis toujours en recherche et j'attends tes propositions... Plutôt rapidement si possible, la cohabitation commence à devenir compliquée. La vérité c'est qu'Eliot est bien moins en recherche d'un appartement que d'emmerder Victoria et de lui faire perdre son temps. S'il avait fait le choix de garder ses souvenirs d'Evermore, il avait aussi pris la décision d'embrasser pleinement sa nouvelle existence et se cantonnait habilement à celle d'Eliot Drysdale, évitant de chercher à tout prix à reprendre contact avec ceux qui partageaient autrefois la vie du roi de Frostväll. Pourtant les états d'âme de Bianca restaient encore trop présents dans son esprit pour qu'il ne cède pas à la tentation et, sitôt qu'il avait reconnu ses traits sous l'identité de Victoria Grey, agent immobilier indépendante, il s'était empressé de la contacter. — Qu'est-ce que c'est, du champagne ? Et bien super, ça fera un apéritif parfait pour discuter opportunités immobilières. Et puis en plus t'es libre maintenant, non ? De mémoire, jamais Eliot ni Jack n'avaient pris autant de plaisir à jouer de leurs charmes que pour séduire Victoria. Il n'était pas dupe : il savait qu'elle ne lui était pas indifférente et pour cause, il maintenait une balance parfaite entre client insupportable destiné à lui faire perdre son temps et jeune célibataire charmeur dont raffolait la Bianca de ce monde. Un petit manège qui, malgré le plaisir que Jack prenait évidemment à ce jeu, restait parfaitement innocent puisqu'Eliot se refusait à initier quoi que ce soit de romantique avec elle tant il ne pouvait imaginer Bianca autrement qu'en princesse dramatique et impétueuse de Nighon.

Une fois le cap fatidique des trente ans, la brune avait bien été obligée de troquer ses soirées étudiantes – auxquelles elle avait continué de participer bien après avoir fini ses études – pour un rythme de vie qui lui assurerait au moins de moins subir les éclats de l’âge. Victoria s’était pliée finalement avec un certain plaisir à un quotidien marqué par les cadeaux que son nouveau train de vie lui permettait de s’offrir. Elle n’avait plus jamais manqué une occasion de décliner une invitation à une soirée qui ressemblerait sûrement à celle juste avant pour se faire livrer son repas et déballer ses colis du jour. Et c’est exactement à ce genre de fin de journée qu’elle se destinait si elle n’avait pas été interrompue dans son programme par l’arrivée d’Eliot et bien… dans son propre immeuble, à celui-ci. Elle estima bien avoir quelques minutes à perdre à saluer ce charmant client à qui elle avait beau proposer les appartements les plus luxueux comme les moins coûteux sans arriver à atteindre les standards du blond. Il oscillait entre refus net devant une fenêtre soi-disant trop mal placée, un loyer trop important, quand il n’oubliait pas simplement de se présenter à une visite qu’elle lui avait organisé avec des propriétaires. La curiosité de Victoria l’avait, bien entendu, dans un premier temps emporté. D’abord parce qu’elle était d’un naturel à se laisser flatter par la perspective de passer des après-midis perdues à visiter tous les quartiers de Londres avec un garçon de la trempe de Drysdale, ensuite parce qu’elle avait voulu en savoir plus sur cet ami d’amis qui avait subitement décidé de faire appel à ses conseils avisés pour trouver un logement. Evidemment, l’explication était toute trouvée et ne manquait pas de logique. « Ah, et ta sœur ne supporte plus ta présence, quelle ingrate. » Elle sourit, elle appréciait les formes qu’il mettait, mais si le badinage d’Eliot avait quelque chose de charmant les premiers temps, d’une part, elle avait trouvé son bonheur ailleurs, d’autre part, la recherche éternelle du garçon commençait sérieusement à empiéter sur le temps qu’elle pourrait consacrer à d’autres clients. Elle passa une main distraite dans ses cheveux, cherchant la manière d’amener les choses. Si elle se trompait sur son compte, elle perdait un bon client. Parce que si sa sœur pouvait se permettre de vivre ici… En même temps, il y avait plus désagréable comme client. Mais le vrai questionnement qui habitait Victoria était de savoir quelles étaient les véritables intentions de Drysdale. Parce qu’après quelques années dans le métier, elle en avait vu des clients changer d’agent quand les recherches devenaient à ce point infructueuses. Mais elle avait aussi pris en maturité et ne voulait pas surinterpréter le dévouement d’Eliot dans sa recherche d’appartement. « Ecoute Eliot… Je ne sais même plus quoi chercher. On a tout visité, on a tout vu, je vais devoir faire du sur-mesure au point où on en est. » Le ton de sa voix laissait échapper plus de désarroi qu’elle n’en aurait imaginé. Elle regarda sa bouteille et, malgré elle, laissa échapper un sourire. « Je ne suis pas sûre que ça nous aide à y voir plus clair, mais puisque de toute façon j’allais la finir toute seule. Normalement, je réserve ça à ceux qui signent un contrat et qui me permettent de toucher une commission confortable. » Sous-entendu ceux qui ne lui faisaient pas perdre son temps. Quant aux raisons qui la faisait accepter, il ne faut pas lui attribuer de mauvaises intentions, elle espérait au moins tirer les choses au clair bien qu’elle ne sache pas trop à quoi s’attendre. Elle fronça les sourcils pendant qu’elle lui tendait la bouteille. « Tu aimes bien te créer des problèmes non ? » Elle ne le connaissait pas assez pour émettre ce genre de jugement, mais elle avait comme l’impression que ce besoin de déménager de chez sa sœur sortait de nulle part et qu’il faisait partie de ces personnes bien loties qui se lèvent un matin avec le besoin de se fixer un objectif pour pimenter leur journée, même si ledit objectif doit être l’acquisition d’un bien à plusieurs centaines de milliers de livres. Le jugement de la brune semblait avoir une portée beaucoup plus générale qui, elle en était persuadée, collait plutôt bien au personnage qu’elle avait en face d’elle. « Bon, chez toi ou chez ‘moi’, j’ai encore les clés de l’appartement. T’es mignon mais je vais pas finir ma journée assise sur les marches d’un escalier de service et on a du boulot. » Parce qu’il lui donnait l’impression qu’il considérait que sa journée n’attendait que de tourner autour de lui. Or Victoria Grey avait actuellement une vie comblée.

evermore and further

» if you ever want to be in love · r/eliot.
» slowly, and then all at once · w/eliot