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blinding lights

@ella penprase 🙵 andrew humphrey

Carte de métro dans la main, prêt à la rébellion et à braver des codes que je n’ai jamais vraiment dompté, ou compris. Manque de volonté, manque d’envie, manque d’intérêt. Casquette vissée sur la tête, barbe de trois jours et chemise débraillée, il n’y a que cette veste qui trop grande qui me donne des airs de sang bleu que je n’ai pas. Alors que j’aurais troqué volontiers cette soirée pour un moment avec Reira, je soupire longuement lorsque trois coups se portent à mon bureau. Il est temps d’y aller. Je range la carte de métro dans ma poche. Le chauffeur attend en bas. J’allume une cigarette et profite d’une accalmie relative pour écouter Londres se revêtir de son costume de nuit, alors que ses lumières s’éveillent et s’emballent. Encore une nuit bien vivante qui s’annonce. Les pubs se remplissent à mesure que les bureaux se vident. J’écrase mal ma cigarette, la laissant se consumer et s’éteindre. La gorge raclée, les assistants m’arrangent sur le chemin de sortie. Col fermé, cravate sans doute un peu trop serrée, chemise réarrangée. Ma seule limite se pose lorsqu’une main audacieuse tente de m’arracher ma casquette. Non. Mes sourcils se froncent, l’air se fait sombre. Un grognement s’élève et la personne se ravise.

Une fois dans la voiture, seul, je regarde mon téléphone paisiblement, pensant à me libérer un créneau le plus vite possible pour être plus utile que dans ces événements mondains. La nourriture n’y était même pas bonne, en plus. Je roule des yeux, affalé sur le siège arrière. Une fois à destination, le chauffeur ouvre la portière, je lui offre un léger sourire sincère, ne manquant pas de glisser un généreux pourboire pour l’attente. Foutue clope. Aussitôt dehors, j’en allume une autre. Adossé au mur, je prends le temps de savourer ce poison de nicotine et vois les convives se précipiter à l’intérieur. Il y avait encore du temps, je ne comprenais pas réellement leur hâte. Mon pied tape un rythme que seule ma tête connait et lui dicte. Une voix vient pourtant troubler la mélodie qui s’installe. Elle, encore. Il m’avait fallu des jours pour ne plus me souvenir de sa voix à la moindre intonation un peu trop familière. Inconnue, dont je ne connaissais que le nom, Penprase, elle me restait dans la peau. Je fronce les sourcils, la fixe sans ciller. Alors que nos regards s’apprêtent à se croiser, je détourne volontairement la tête. Dans un enchainement rapide, ou plutôt précipité, j’écrase ma cigarette dans le cendrier et dans une danse étonnamment synchrone, je me retrouve à lui passer devant et à lui tenir la porte de la salle de réception. Rouge écarlate à force de retenir mon souffle, je pouvais être confondu avec ces homards que les serveurs tentent désespérément d’offrir.

Coupe de champagne dans la main, elle se crispe. L’hôte invite les invités à trouver leur place à leur table respective. Alors que je signe un chèque et que je le dépose à l’endroit adéquat, j’entrevois la porte de sortie. Elle n’est pas loin. Je peux y arriver. J’inspire profondément et me prépare à prendre le meilleur départ de ma vie, littéralement. Mais une main se pose sur mon épaule et m’invite à prendre ma place. Sourire crispé, je fais un léger signe de tête en guise de remerciement. Prenant enfin mon siège, je vois son nom sur une étiquette, juste à côté de la mienne. Mes mains se joignent entre mes jambes et je déglutis péniblement. Les autres invités finissent par me rejoindre. Dans un moment de calme, je renifle bruyamment et regarde autour de moi. Même les séances photos de Reira étaient plus agréables. Et de loin. Lentement, mes lippes s’animent et sans tourner mon visage vers elle, je me râcle la gorge. « Hm. » J’inspire. « B’soi.. Bonsoir. » Les manières, pourvu qu’elles soient bonnes.

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@ella penprase 🙵 andrew humphrey

Dans ce faste, où chacun s’évertue à imposer son propre rythme, ils ne semblent pas se rendre compte qu’ils ne sont que des notes à une partition déjà écrite, depuis des siècles. La noblesse, qui veut plus encore et atteindre des cercles toujours plus hauts. Je ne comprenais pas très bien l’intérêt, et en soi, je pouvais partir l’esprit serein. Chèque déjà déposé, je préférais y mettre de l’énergie plutôt que de l’encre. Demain. Ce soir, il fallait faire bonne figure. L’idée de hacker tous leurs sites internet et comptes bancaires me traversa l’esprit, étirant mes lippes sans doute un peu trop longtemps pour échapper à la vigilance des meilleures commères. Alors, mon visage se ferme aussitôt et parcours les invités dans leurs tenues scintillantes. Je n’imaginais pas que des vêtements puissent briller autant. La table se remplit et les politesses s’acculent. Je roule des yeux, réflexe que je ne parviens pas à retenir. Mondanités plus acerbes les unes que les autres, je suis reconnaissant qu’aucune ne me soit adressée. Je me contente alors de tremper mes lèvres dans la coupe de champagne, commandant dès que l’occasion se présente, un scotch sans glace. J’aurais préféré une bière, mais la dernière fois est encore bien trop fraîche. Provocation pour certains, je ne comptais pas faire long feu.

Les compliments pleuvent sur l’intrigante brune, que j’écoute d’une oreille distraite. Dans la mode, si je me souvenais bien de la dernière soirée. A succès, visiblement. Je hausse les épaules, l’air convaincu de mes pensées. Téléphone entre les mains, je regarde quelques mails urgents, toujours distrait par la voix de ma voisine de table. Il y avait quelque chose de louche dans ses intonations. C’était comme en connaître l’air, sans être capable de mettre le mot sur un titre ou un auteur. Les sourcils froncés, concentré plausiblement sur mon écran, je finis d’une traite mon verre, qui est aussitôt rempli. Des regards s’attardent, je me râcle la gorge et éclipse le téléphone dans la poche de ma veste. « Hm ? » Je retire ma casquette, replace mes cheveux nerveusement et la revisse aussitôt. « Visiblement pas » Glisse un invité. « Ca doit prendre du temps, de s’y habituer. Et j’en ai pas à perdre. » Offusquée, son visage se déforme légèrement et alors que je me rends compte de mon effet sur elle, il est déjà trop tard. « Malheureusement. » Je renifle bruyamment et descends à nouveau mon verre.

Un silence s’installe à la table, sans doute un peu trop long. Je sors à nouveau mon téléphone, réponds à des messages et autres activités. Toujours en rapport avec le boulot. Mon regard finit par croiser celui de ma voisine, Ella. Aussitôt, mes orbes se font fuyantes et je me retrouve à planter mes yeux dans ceux à la langue acérée. L’homme commence à rougir, et sans m’en rendre compte, je l’épie et cesse de ciller. « Mr. Humphrey ? Que vous arrive-t-il ? » Ma mâchoire se serre, je secoue lentement la tête. « Vous avez une tâche. » Je balaie la table et attrape une serviette en soie pour essuyer sa tâche. Malencontreusement, tout s’étale et gâche sa tenue blanche resplendissante. « Ah. » Je lâche alors le bout de tissu et range mes mains dans mes poches, toujours avec ce même air impassible. La soirée promet d’être longue, et les bonnes manières aux abonnées absentes.

Sans que leurs us et coutumes ne m’atteignent, négligeant et d’une logique implacable, je ne prête pas attention à ce qui se passe autour de moi. Je ne suis pas des leurs, alors je reste dans mon monde, et tant pis pour leurs jeux aux règles qui m’échappent. L’alcool coule encore à flot, et je m’empresse d’y plonger. Tôt ou tard, il sera question d’accoster à leur port doré, plus tôt que prévu. Ma voisine de tablée manque de s’étouffer. Maladroit, mon bras se tend comme pour lui venir en aide, avant de me raviser. Et c’est cette même main tendue qui manque de faire virer la soirée un peu plus au fiasco. La tâche, victime collatérale de ce geste inabouti. L’aide devait bien s’abattre sur quelqu’un, après tout. La pauvre s’étale et n’en finit plus de se répandre sur la chemise du convive. Sans ciller, je retrouve ma place et enfonce mes mains dans mes poches. Toujours de marbre, je les observe se lever et s’en aller. Les regards n’osent plus s’affronter et je ressens une gêne, que j’ai occasionné. Lentement, je me racle la gorge, la mâchoire serrée peine à laisser les quelques mots s’échapper. Le regard un peu trop bas, j’incline un peu plus la tête pour me retirer et m’échapper à l’extérieur. Un pied encore à l’intérieur, je dégaine un bâton de nicotine et m’empresse de l’allumer. Des bruits de talon claquent au sol et je me décale derrière un piller. Le bruit du briquet résonne, je penche alors légèrement la tête. Ma voisine de table, elle aussi, n’avait pas l’air d’être dans son élément. A moins qu’elle y soit, mais qu’elle ait simplement eu sa dose. Je distingue une grimace se peindre sur son visage. Oscillant, je finis par m’avancer vers elle, quitta l’abri dérisoire. M’annonçant avec un simple raclement de gorge, je me décide à prononcer enfin quelques mots qui ne soient pas de simples onomatopées. « Hm. Le champagne, ça file mal à la tête. » Je place la cigarette entre mes doigts et fais un pas de plus vers elle. « A moins que ça soit toutes ces dorures, ça finit par piquer. Un peu. » Le premier bâton à peine terminé que le second s’embrase à nouveau. Maigre sourire timide, je renifle, observe les environs pour finalement poser mon regard sur la jeune femme. Les orbes s’attardent sans doute un peu plus qu’il ne le faudrait, alors je profite du passage d’un serveur pour y attraper un verre de gin. « Merci. » L’homme s’en va, les convives s’animent et la ville vit. Il y avait cette sensation étrange, qu’au milieu, il n’y avait qu’Ella, et moi. Cercle improvisé dont j’ignorais encore la nature, hostile ou non, au moins il y avait de quoi boire et s’y perdre.